J'ai été touchée par le dernier roman de Eric Holder,"La baïne" un livre
poignant, fin, moderne, qui met en scène la vie lisse et pourtant
bouleversante d'une femme encore jeune, en province, correctement
mariée et gâtée par deux charmants rejetons. Sauf qu'il faut se méfier de
ces vies lisses tellement conformes aux fantasmes de bonheur martelés
par notre société peu imaginative. Peu comblée par les petites joies sans
danger et les tracas mineurs de son quotidien, Sandrine n'en est pas
moins une femme, en fait, avec des pulsions secrètes et des rêves
inépuisables, une sorte de Bovary tremblante baillant après l'amour comme
une carpe, prête à se donner au premier sauveur phallique venu. Arnaud, en
l'occurrence, un photographe qui la révèle en l'épinglant quelques
instants d'un œil expert et l'entraîne dans un pas de deux inégal
et merveilleusement toxique, celui des amours interdites où l'on est la
perdante. Eric Holder restitue avec délicatesse et modestie cette palette
de souffrances propres à l'adultère, surtout lorsqu'elles s'enveniment peu
à peu de la rumeur des Autres, guetteurs pervers et pathétiques piégés dans
une vie provinciale étriquée.

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