Un livre grinçant du grand écrivain anglais. Guy Crouchback rejeton introverti d'une riche famille de la gentry décide de s'engager en 1940 afin de participer à l'effort de guerre de son pays ; mais Guy approche de la quarantaine,n'a jamais travaillé, et confesse un catholicisme fervent qui confine à la bigotterie. Dans ces conditions seul le"piston" lui permet d'intégrer une unité prestigieuse : Les Hallebardiers du comte d'Essex.Waugh avec un humour ravageur,distancié, en un mot éminemment anglais, nous conte les mésaventures d' un homme qui croit encore à certaines valeurs ,le courage,la justice,la responsabilité,la Patrie... valeurs déjà obsolètes dans la grande tourmente de mai 40, et qui voit tous ses efforts pour atteindre ses idéaux réduits à néant par l'inconséquence,la pusillanimité,la veulerie de ses supérieurs comme de ses subordonnés.
Guy Crouchback qui révait d'en découdre,tel un preux chevalier des Croisades terrassant le Maure sous les murs de Jérusalem, se voit relégué dans un obscur camp de transit anglais,menacé de sanctions disciplinaires pour avoir obéi à un ordre stupide d'un supérieur non moins stupide,alors que la débacle des armées alliées s'accomplit dans le désastre de Dunkerque.
Au delà de la narration de Waugh c'est une page d'histoire trés précise,trés datée, qui nous est relatée ici ; Waugh (qui connait bien son sujet), prend un malin plaisir à faire ressortir toute l'incroyable impréparation de l'armée anglaise à la veille de la guerre,la suffisance de ses cadres, le manque de matériel chronique, la mesquinerie généralisée...En fait l'on s'apperçoit que la France n'avait pas seule le monopole de l'inconscience en face du danger hitlérien... la ligne Maginot de lAngleterre c'était l'Empire... on a vu le résultat. Sauf que les anglais se sont repris magnifiquement avec un courage indomptable (ok c'est une ile,ça aide à résister...).Pages amusantes de Waugh sur De Gaulle ; en effet son héros participe à l'expédition chargée de récupérer pour la France libre la colonie du Sénégal, expédition qui se solda par un fiasco comme l'on sait...

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Je suis justement en train de relire ce livre et je souscris totalement à ton analyse. Pittoresques aussi les relations de Crouchback avec les femmes ! Et ce livre me semble bien différent des autres de Waugh. Dans Hommes en armes, il modère son humour, me semble-t-il, afin d'exprimer avec plus de conviction encore l'atmosphère morne et médiocre qui déçoit tellement le héros.

Merci Frac, ça me fait plaisir que quelqu'un lise encore un livre de Waugh aujourd'hui ! (c'est en lisant un livre de Olivier Todd que j'ai eu envie de lire cet écrivain dont je n'avais rien lu-et meme que j'étais persuadé que Evelyn Waugh était en fait "une" écrivaine....) .
Effectivement le rapport aux femmes de Crouchback ne semble pas simple (la scene ou il revoit sa femme à Londres...), mais son catholicisme intransigeant doit y etre pour beaucoup ; (Waugh n'était il pas catholique ?? ). Et aussi ,ce que je n'avais pas noté, la ponctuation du livre en chapitres dédiés à un représentatif spécimen de la "folie" anglaise: Apthorpe. Il semble condenser tout le dérangement de cette époque mais j'en suis encore à me poser la question du sens de sa destinée dans le roman de Waugh...

Merci de ta réponse, Amiread, pour ce qui est de lire des livres ringards, je ne crains personne.
Si tu as aimé ce roman de Waugh, je te conseille Le cher disparu qui est une satire des rites funéraires des Américains de son temps. Je ne sais pas si ces habitudes se sont modifiées depuis, mais c'est stupéfiant, on hésite continuellement entre le rire et le dégoût...
Pour en revenir à notre Hommes en armes, as-tu compris l'épisode de la machine infernale ? Il s'agit d'une toilette portative qu'Apthorpe utilise parce qu'il craint les maladies vénériennes. Mais pourquoi explose-t-elle à un moment donné ??!! Je dois dire que cet épisode me laisse perplexe.

Bonjour Frac. Oui j'aime bien Waugh, j'ai lu "Pour une poignée de cendres", c'est assez réjouissant ! j'ai mis une note de lecture sur le site.
Quant à ce fameux chapitre sur la machine infernale... (le summum de l'humour anglais me semble-t-il) je pense avoir compris pourquoi elle explose (ce qui "colle" avec sa dénomination par Apthorpe de "machine infernale" alors que ce n'est qu'un vulgaire "chiotte chimique".
Souviens toi, Guy et Apthorpe vont diner chez cet italien,Pelecci, que Waugh nous présente comme espion à la solde de Mussolini ; ils parlent dans leur conversation échauffée par le Barolo ,de "machine infernale", et Pellecci est persuadé qu'il s'agit d'une nouvelle arme de guerre (page 171 dans l'édition 10/1. De là à penser que l'explosion de la "machine infernale" est due à un acte de sabotage dudit espion... Pour moi c'est la cause la plus "logique" ; mais l'on peut également envisager une option plus délirante : les selles de Apthorpe et du général (il utilise également l'appareil...), le tout conjugué avec un mauvais emploi des produits chimiques.... Boum ! Bon j'arrete là, il me semble que nous sommes sur un site littéraire !!
Bonne soirée Frac.