Encore un livre étonnant d'Annie Ernaux qui, personnellement, m'a davantage touché que "Une femme" et au moins tout autant sinon plus que "La place". L'auteure nous raconte la folle passion qu'elle a vécue pour un homme, originaire de l'Europe de l'Est et marié, désigné dans ce livre par l'initiale A, jusqu'à son départ pour un autre pays. le rapport quasi clinique qu'elle nous livre sur cette passion dévorante est un paradoxe en soi qui traverse tout le livre : comment une femme qui, abandonnant tout sens critique, ne vit plus que dans l'attente et le désir de l'autre est-elle capable, quelques semaines après la fin de cette aventure, d'en écrire le récit de façon si dépassionnée ? Sans doute que l'écriture est, pour Annie Ernaux, une passion encore plus dévorante et que la passion pour son amant a servi à alimenter cette autre passion, encore plus puissante. Vers la fin du livre, quelques paragraphes nous renseignent sur la façon dont l'auteure a écrit son récit : « Mais je continuais à vivre. C'est-à-dire qu'écrire ne m'empêchait pas, à la minute où j'arrêtais, de sentir le manque de l'homme dont je n'entendais plus la voix, ne touchais plus la peau, qui menait dans une ville froide une existence impossible à me représenter – de l'homme réel, plus hors de portée que l'homme écrit, désigné par l'initiale A. ».
Je reste fasciné comme le cobra par la flûte du charmeur de serpent.
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