Ce livre, écrit il y a plus de vingt ans et, donc en des temps moins suspects, représente la tentative réussie de faire comprendre au lecteur le sentiment de terreur et de frustration que le peuple albanais éprouve devant la force écrasante d'une dictature.
Les esprits sont obscurcis par la propagande politique, bien encadrés et réglés comme un peloton en marche, ceux qui sont « contre » sont jetés par des mains invisibles dans les mines de chrome, les sentiments sont frustrés par des schémas très rigides.
Ainsi l'amour du protagoniste pour la fille d'un haut dirigeant du Parti lui est de ce fait interdit par les logiques de carrière du père d'elle. Mais un doute féroce accompagne le narrateur : il lui revient à l’esprit le sacrifice d'Iphigénie ; d'abord, il croit trouver un parallélisme avec l'histoire qui le lie à Suzana, mais ensuite il comprend que ce n'est pas la même chose. La « violence » perpétrée sur elle n’est pas tant que la négation de toute pulsion que l'éclosion d'une nouvelle forme d'idée.
Un concept qui devrait faire réfléchir celui qui encore éprouve de la nostalgie pour ces formes de pouvoir.
J'ajoute, d'autre part, que les événements de ce roman se poursuivent avec le livre « le successeur », écrit à vingt ans d’intervalle mais publié simultanément.
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