Dans ce quatrième tome de la série Terremer on retrouve Tenar, le personnage principal du deuxième tome. Bien des années se sont écoulées. On découvre qu'elle a fait le choix peu de temps après la fin du tome 2 de rester à l'écart des grandes affaires du monde et de la sorcellerie, et qu'elle s'est consacrée à vivre pleinement une vie simple et pleine de sens pour elle : se marier, avoir des enfants, s'occuper de sa ferme...
Au début du livre ses enfants sont grands et ont quitté la maison, et son mari est décédé. Tenar vit seule dans sa ferme. Son amie Lark découvre qu'un petit groupe de vagabonds qui campaient depuis un moment près du village, vivant de mendicité et de prostitution, se sont enfuis précipitamment, laissant sur place une fillette. Ils l'ont manifestement jetée dans le feu alors qu'elle était inconsciente, essayant de faire passer pour un accident les abus qu'ils ont commis sur elle. La fillette est affreusement défigurée mais survit à ses blessures, grandement affaiblie à cause de la fumée du feu qu'elle a respirée et qui lui a brûlé les poumons, et extrêmement renfermée à cause des traumatismes qu'elle a vécu.
La suite des événements va pousser Tenar a quitter sa ferme en compagnie de la petite fille, et à se retrouver à nouveau en présence de gens soit-disant importants, des sorciers, des nobles, des rois. Elle va être amenée à réfléchir à la façon que les gens ont de traiter les gens différents (la petite fille défigurée mais également elle-même qui vient d'un autre pays et a une couleur de peau différente des gens d'ici), à la place des femmes (pourquoi certains hommes méprisent-ils tellement les femmes ? pourquoi une femme ne pourrait-elle pas être mage ?) et au sens qu'elle veut donner à sa vie.

Le livre est extrêmement bien écrit et on se glisse dans les pensées de Tenar comme dans un cocon. L'histoire se déroule en douceur malgré les événements tragiques qui s'y passent, et semble presque n'avoir d'importance qu'à cause des réflexions qu'elle engendre chez Tenar. Une très belle conclusion pour cette belle série.

« Au commencement, les dragons et les hommes ne faisaient qu’un. Ils formaient un seul peuple, une seule race ailée, et parlaient le Vrai Langage »
Avec cet opus, l’auteur nous narre les origines des archipels de Terremer, où règne encore la magie qui représente le fondement du dernier des livres dont l’histoire se déroule dans ce lieu fantastique.
La protagoniste est Tenar, une jeune femme qui, même si sa vie a changé, renferme toujours en elle l'esprit de la magie, sait comment affronter des choses que l’esprit humain ne comprendrait pas.
Un règne sillonné par le mal et la délinquance, comme notre ère, où un roi et une femme doivent porter la lumière.
Au-delà d’eux, un autre personnage, petit et insignifiant, qui cache derrière elle une force mystérieuse, conclura l'histoire d’une manière des plus inattendues.

"Tehanu" est une chronique douce-amère qui suit, quatre saisons durant, et à travers le chassé-croisé déroutant d'hommes et de femmes qui poursuivent et fuient en même temps le pouvoir, les étapes de la métamorphose d'une petite infirme, victime de la cruauté de ses semblables et qui apprendra à parler aux dragons.

C'est une histoire surprenante, située normalement à la fin d'un des plus grands cycles de fantasy. La fin semble ouvrir de nouvelles possibilités scénaristiques, comme si l'auteur s'était préparée à la publication de recueils de nouvelles ou de prolongements de ce monde par d'autres auteurs, comme c'est la tradition dans ce genre littéraire... C'est un peu dommage dans le sens où il s'agit clairement d'une volonté éditoriale.
Pourtant on ne peut rester que sous le charme de l'écriture d'Ursula Le Guin, qui tranche avec les auteurs modernes et même les anciens. Pas d'effets spéciaux, pas de grandes envolées lyriques, mais une maîtrise des personnages. Ici nous sommes dans le cadre d'un monde de Terremer à la dérive, boulversé par les événements des chapitres précédents. La magie n'est plus qu'une sorte de mythe nostalgique. La force du récit réside alors dans la peinture très fine de personnages entre deux âges : celui de Terremer et le leur.
Finalement une très belle conclusion au cycle.