[Le retour du hooligan : Une vie | Norman Manea, Odile Serre]

Le retour du hooligan ( Une vie )
Traduit du roumain par Nicolas Véron
Editions du Seuil

Norman Manea est né en Bucovine (Roumanie) en 1936. Le premier voyage qu'il a fait, c'est à 5 ans. Dans un wagon à bestiaux, avec parents et grands parents. Les plus âgés ne reviendront pas. Le maréchal Antonescu avait décidé la déportation de tous les juifs dans des camps en Ukraine. Il est revenu 4 ans plus tard. "J'étais un vieillard qui allait avoir 9 ans".
Et à 50 ans, trop tard peut être, il est reparti: " A cinq ans la première fois à cause d'un Dictateur. A cinquante ans, à cause d'un autre Dictateur et d'une idéologie opposée. Quelle blague!".
Oui, enfin, c'est d'un humour désespéré qu'il s'agit là, et c'est au cours d'un bref séjour effectué à contre coeur sur le sol natal qu'il résumera ainsi: " Reste la honte de ne pas être parti à temps, la honte d'être parti quand même, la honte d'être ramené au point de départ."
Avant l'exil, avant l'abandon de sa mère qui le suppliait d'au moins revenir pour son enterrement, le refuge pour lui était l'écriture : " Grâce au dialogue engagé avec des amis virtuels, la littérature allait me sauver de la mutilation imposée par l'Autorité". Sauver des nouvelles persécutions, de la délation systématique, des tribunaux populaires qui de nouveau transforment son père en "pou" et lui en "fils de pou" à cause d'une anonyme et fausse dénonciation ( pour un crime impardonnable, il aurait offert gratuitement une bicyclette à quelqu'un.......)et l'envoient croupir dans un autre camp.
"La fatalité de la terreur pouvait s'abattre sur n'importe qui, n'importe quand, n'importe où et pour n'importe quelle raison."
Car ,pour Manea, l'exil signifiait plus que quitter la terre, c'était quitter la langue. Il se demandait si l'exil, pour un écrivain, n'était pas l'équivalent du suicide. Mais peu à peu ,la réalité l'impose: "Et la mort qui me guettait ici, à domicile? Le rétrécissement accéléré de l'existence, la prolifération des dangers rendaient sans objet les inquiétudes quant à la possibilité de renaitre , au seuil de la vieillesse, dans une autre langue et un autre pays."
Alors, avec toujours sur lui ces phrases de Joyce dans Dedalus : " Je ne veux pas servir ce à quoi je ne crois plus , que cela s'appelle mon foyer, ma patrie ou mon Eglise. Je veux essayer de m'exprimer ,sous quelque forme d'existence ou d'art, aussi librement et complètement que possible, en usant pour ma défense des seules armes que je m'autorise: le silence, l'exil, la ruse.", Manea va organiser son départ; D'abord vers l'Allemagne, puis les Etats Unis .
Etats Unis où il vit désormais, Etats Unis, pays des exilés de tous lieux, et de Mark Twain , dont les phrases suivantes pourront accompagner celles de Joyce: "Je crois ne pas avoir de préjugés. Je peux affronter n'importe quelle société. Tout ce qui m'importe est de savoir qu'un homme est un être humain -cela me suffit. Il ne peut pas être pire".......

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J avais moi aussi relevé la phrase de Mark Twain ! c est une phrase terrible qui colle bien a ce qu a vécu Manéa, mais je trouve aussi qu elle est tout à fait actuelle lorsque l on constate l état du monde....

Oui...Je viens d'aller vérifier, c'est vous qui aviez parlé de Disgrâce. Je crois que si ce livre de Coetzee m'a semblé si désespéré- et désespérant- c'est que la fin de l'apartheid pouvait s'apparenter à un espoir ( et d'ailleurs, c'en est un, sauf qu'il faudra beaucoup de temps), et que le constat de Coetzze est tellement réaliste et sans appel sur l'homme...

Oui c est tout à fait ça. "Sans appel et tellement réaliste sur l homme"...Je pense que Coetzee a dépassé les problèmes de son pays ; dans "Disgrace" c est toute la souffrance de la création qu il met en scène -souffrance de la fille du narrateur, souffrance des animaux, souffrance du narrateur (Coetzee ???), qui pour un moment d égarement paye au centuple....Je conviens que je sors des livres de Coetzee dans un état un peu nauséeux mais qui correspond quand meme à ce que je pense profondémént du "monde", de la vie, de la mort....du destin de l "Homme".... C est sur Coetzee c est l anti.... Jean d Ormesson, ou meme l anti Pascal Jardin si tant est que l on puisse comparer un moineau a un aigle.... (bien que j aime quand meme bien D Ormesson...).
Je suis en train de lire "Dolce agonia" de Nancy Huston et je retrouve cette meme lucidité impitoyable que dans Coetzee : Notre pauvre destinée d etre humain c est là et maintenant...! pas d idéalisme, pas de faux espoirs ; nous nous débattons tous dans nos représentations du monde, l incommunicabilité entre les ètres est totale.... C est pas trop gai n est ce pas ?? Mais j ai remarqué que nous prenons souvent plus de plaisir à lire un livre "désespéré" qu un livre "optimiste" ou tout le monde s embrasse à la fin..
Bonnes lectures au Paradis!!!! (je ne connais pas Tahiti, j imagine seulement...).

Mais j ai remarqué que nous prenons souvent plus de plaisir à lire un livre "désespéré" qu' un livre "optimiste
Et pourquoi, à votre avis? Je pose la question à un spécialiste , je viens de faire un tour dans votre bibliothèque et ai noté dans votre liste de souhaits Les récits de la Kolyma....que j'ai lu ....à ce stade là, on ne parle même plus de pessimisme ou d'optimisme, non?

Tu confonds "Le ciel de la Kolyma" de E. Guinsburg que j ai effectivement lu avec "Les récits de la Kolyma" de Varlam Chalamov. De toute façon je n ai pas mis de liste de souhaits dans L Agora ; et puis c est la nature humaine, pourquoi le succés des "Bienveillantes" ?? a moins d etre un optimiste béat et de croire à la bonté naturelle de l homme il y a une jubilation certaine a constater l opiniatreté de l homme a perséverer dans ses "passions" les plus abjectes ; je lis pas mal de livres d Histoire, et l Histoire est tout sauf angélique, j y prends beaucoup de plaisir meme si souvent meurtres,génocides,attentats,crimes divers, s y succedent depuis que l homme a commencé a s imaginer un "destin"...
Et puis faut pas croire cela m arrive de lire des livres droles et optimistes qui te donnent la pèche une fois la derniere page lue: tiens par exemple "Quitter la ville " de Christine Angot....non je plaisante.

Alors ça! Agora me joue encore des tours?
Va voir dans ton profil, liste de souhaits, mois j'y lis Récits de la Kolyma. Hum... C'est peut être ton inconscient qui s'est exprimé...
Alors, tu analyses le succès ( heu, beaucoup l'ont acheté, mais combien l'ont lu?) des Bienveillantes comme une espèce de voyeurisme jubilatoire? Intéressant. Et sans doute pas faux...

non, voilà, j'ai copié, les souhaits, ce n'est pas ce qu'on souhaite lire???
AMINETTE Récits de la Kolyma Varlam Chalamov, Sophie Benech (Traducteur), Catherine Fournier (Traducteur), Luba Jurgenson (Traduc
fiction
VERDIER

Du coup, je suis allée voir dans mon profil pour voir dans la section souhait ce qui m'était préconisé, je l'aurais lu, mais il n'y a rien...

Oh honte à moi!! tu as raison je viens d aller dans ma liste de souhaits ! comment Les récits de la Kolyma se sont trouvés dedans je l ignore ??? je n utilise jamais cette possibilité du site... Quant aux "Bienveillantes" je ne l ai pas encore lu, mais je pense que son succès tient quand meme beaucoup a son coté sulfureux ; et puis Litell nous montre que meme la Culture ne nous sauve pas du mal, et que, ma fois , son "heros" , était un etre ordinaire...c est ça qui est "fascinant" et qui peut etre déclenche le voyeurisme dont tu parles. Bon l on pourrait en discuter pendant des heures et l on trouverai certainement des dizaines d avis différents !
Je te réitère mes excuses pour avoir douté de ta clairvoyance mais j avoue que je ne comprends toujours pas comment a pu se faire cette manip ?je n ose quand meme pas imaginé avoir inscrit ce livre dans ma liste un jour d excès alcoolique ...! ce qui expliquerai que je ne m en souvienne plus ?

Allons bon. Une enquête s'impose. Soit quelqu'un veut t'envoyer très subtilement au goulag, soit tu n'as pas l'excès alcoolique très gai...

ma fois , son "heros" , était un etre ordinaire.: non, justement, et c'est le problème posé par les Bienveillantes! C'est d'emblée un psychopathe, le personnage des Bienveillantes, et cela fausse quelque peu le problème posé et l'analyse que l'on pourrait éventuellement en faire...

Bonjour Mop. Oui, vous le dites bien le "héros" se présente comme... Mais c'est un roman. Si vous le voulez bien, je vous réponds sur vos notes au sujet de ce livre.