[Les lunettes d'or / et autres histoires de ferrare | Bassani G]

Giorgio Bassani n a écrit que des nouvelles, meme si certaines sont assez conséquentes comme "Les lunettes d or " . Elles ont toutes pour décor Ferrare dont Dominique Fernandez dans la préface pointe l originalité : "...après Venise la ville la plus fascinante du Nord (...) dont le style à la fois monumental et hallucinatoire.... "
On est loin de l Italie si appréciée chez nous (vous savez, la "petite soeur latine" , "nos cousins transalpins"... Don Camillo et Peppone... ) , le Ferrare de Bassani c est un peu le Chaminadour ( Gueret en fait...) de Marcel Jouhandeau , sauf que les jalousies et les rivalités qui grenouillent dans la ville d Emilie-Romagnie n ont aucune mesure avec les réglements de compte "jouhandesques" ; les histoires de Bassani se déroulent principalement sous la férule pure et dure du fascisme mussolinien et sous les lois "de pureté raciale" de 38 qui virent de nombreux juifs italiens déportés en Allemagne (Primo Lévi bien sur) , dans cette atmosphère,bien rendue dans "Une journée particuliere" d Ettore Scola, il ne fait pas bon d etre juif, homosexuel,intellectuel, ou tout simplement de ne pas manifester ostensiblement sa ferveur nationaliste.

Dans sa nouvelle emblématique "Les lunettes d or" (impossible de ne pas mettre le visage de Philippe Noiret sur celui du Docteur Fadigatti...) , Bassani nous décrit la lente déchéance d un médecin juif, homosexuel, et qui pourtant "ne fait pas de politique...",en butte à la mesquinerie et l étroitesse de ses concitoyens, ferrarais acquis aux rodomontades mussoliniennes sur "la grande Italia" et l "aryannité" du peuple. Bien sur le docteur y perdra sa clientèle sans jamais qu une de ses anciennes connaissances lui jette à la face, dans un accès de franchise, son homosexualité ou sa judéité ; a Ferrare tout est dans le non-dit et l ellipse. Bassani décrit merveilleusement l abjection,la médiocrité crasse de tous les participants à ce "bal des faux-culs" ; toutes classes sociales confondues , personne ne trouve grace à ses yeux ; et meme pas le narrateur , peut etre Bassani lui meme puisqu il dit JE, qui, par lacheté, a laissé Fadigati se suicider.

Superbe préface de Dominique Fernandez qui explique bien la place de Bassani dans les lettres italiennes.
Il pointe également toutes les interactions entre les idées et les comportements qui ont permis au fascisme de se développer : " La toute puissance de ces termites aux mandibules infatigables, voilà le drame de l Italie, la cause de la dictature mussolinienne et de la persécution raciale ".

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